Vue d’ensemble
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Il y a 1258 jours

«La Suisse romande est une véritable pionnière du numérique»

Interview mit Siri Fischer

Le 30 août, la communauté d’intérêts des médias électroniques (Interessengemeinschaft Elektronische Medien, IGEM) a publié le Digimonitor 2021 en collaboration avec la REMP. Dans son entretien avec Sandra Oechslin, Project Manager Marketing / Communications chez REMP, la directrice d’IGEM, Siri Fischer, explique quels sont les résultats qu’elle trouve particulièrement intéressants et dans quelle mesure ils correspondent déjà à la nouvelle normalité. Elle évoque également les défis et les opportunités actuels pour la recherche sur l’utilisation des médias numériques ainsi que pour le partenariat de longue date avec la REMP.

Bonjour Siri Fischer, le Digimonitor 2021 d’IGEM a été publié cette semaine. Quels résultats sont particulièrement intéressants?

Le streaming est toujours en vogue: Netflix a gagné 500 000 téléspectateurs et Disney+, 300 000. En ce qui concerne les réseaux sociaux, TikTok, Instagram et LinkedIn comptent 200 000 à 300 000 nouveaux utilisateurs. WhatsApp subit la concurrence croissante de Telegram, de Threema et de Signal, mais reste l’application principale, même chez les utilisateurs de ces services. Chez les jeunes de 15 à 24 ans, nous constatons quelques changements intéressants: TikTok dépasse Facebook pour la première fois. La moitié de la population totale joue à des jeux en ligne ou à des jeux vidéo au moins occasionnellement. Il n’est donc pas étonnant que la plateforme de gaming Discord compte plus d’utilisateurs que Facebook.


Et qu’en est-il de l’utilisation des médias classiques?

Avec toutes les nouvelles offres numériques, il est toujours surprenant de constater que les médias classiques que sont la télévision et la radio restent toujours aussi populaires. Aucun média ni aucune plateforme ne compte autant d’utilisateurs que la télévision et la radio. Ce sont des médias de masse – pour les jeunes comme pour les moins jeunes. Avec 6,3 millions de téléspectateurs, la télévision compte 3,5 millions d’utilisateurs de plus que Netflix et 1,7 million de plus que YouTube. La radio, avec 6,1 millions d’auditeurs, touche 3,8 millions de personnes de plus que Spotify et 4,1 millions de plus que Podcasts.


Depuis cette année, l’étude inclut également le Tessin. En Suisse italienne observe-t-on le même comportement face aux médias que dans les autres régions, ou est-il différent?

En termes très simplifiés, on peut dire que le Tessin a une utilisation des médias un peu plus traditionnelle que les autres régions du pays. La télévision en particulier est regardée plus que la moyenne en Suisse italienne. La numérisation aussi semble progresser plus lentement au Tessin, par exemple dans les domaines de la banque en ligne, de la vidéoconférence ou des achats en ligne. Toutefois, il existe aussi quelques exceptions frappantes: Instagram est nettement plus utilisé au Tessin qu’en Suisse alémanique. Pour ce qui est de la publicité, il est certainement aussi intéressant de constater que beaucoup moins de personnes en Suisse italienne ont recours au bloqueur de publicité. Le fait que beaucoup plus de Tessinois utilisent la version gratuite de Spotify et acceptent donc la publicité y est certainement pour quelque chose.

Par rapport à la Suisse alémanique, on peut clairement affirmer que la Suisse romande est une véritable pionnière du numérique en Suisse. Les Suisses romands utilisent les réseaux sociaux et le streaming vidéo et musical de façon bien plus intensive et sont les leaders en matière d’achats en ligne. Ils jouent plus souvent en ligne, utilisent plus de consoles de jeu, parlent davantage avec des enceintes intelligentes et portent une smartwatch à leur poignet.


Dans quelle mesure la pandémie de coronavirus a-t-elle influencé les résultats de l’étude, et le Digimonitor reflète-t-il déjà la nouvelle normalité?

Le coronavirus est le catalyseur de la numérisation en Suisse: cela commence par l’équipement et se répercute naturellement sur l’utilisation et les applications par le biais de nouveaux appareils. Depuis 2019, 650 000 personnes de plus utilisent un smartphone et 400 000 de plus un ordinateur portable. Le télétravail entraîne une forte augmentation de l’utilisation des outils de vidéoconférence. Parallèlement, les paiements sans argent liquide avec les téléphones mobiles et le e-banking mobile ont doublé depuis 2019. L’application de paiement suisse Twint a enregistré plus d’un million de nouveaux utilisateurs par rapport à l’année dernière. Le shopping en ligne a également connu une forte croissance depuis le début de la pandémie, tout comme l’achat et la vente en ligne d’objets, par exemple sur Ricardo ou sur Ebay. La seule chose qu’on ne connaît pas encore, c’est la nouvelle normalité en ce qui concerne le cinéma. Puisque les cinémas sont restés fermés jusqu’à il y a peu, nous n’avons malheureusement pas pu enquêter sur leur utilisation en 2021.


De manière générale, la pandémie de coronavirus a encore accéléré la transformation numérique. Quels défis cela pose-t-il et quelles opportunités cela représente-t-il pour la recherche sur l’utilisation des médias numériques?

La fragmentation des offres et des utilisateurs représente le plus grand défi. À un moment donné, les sondages basés sur des échantillons ne sont plus adéquats si vous voulez enquêter sur des centaines de petits et micro médias. La volonté de la population de participer à différentes études doit également être prise en considération. Dans le même temps, nous constatons que les études basées sur des échantillons et surtout sur des panels connaissent une renaissance. Dans les lignes directrices de la World Federation of Advertisers (WFA) pour le futur projet de mesures cross-média, un panel (ou des panels) constitue l’élément central. Le panel fait office d’«arbitre de la vérité» en établissant des critères de référence pour l’utilisation et le chevauchement de la consommation des médias. Il s’avère alors nécessaire de mettre en place des approches de recherche hybrides pour surmonter les limites posées par le nombre de chutes.


Pour en revenir au Digimonitor, y a-t-il déjà des idées sur son évolution?

Nous travaillons avec la REMP afin de voir si nous pouvons enrichir les résultats du Digimonitor avec une typologie d’utilisation des médias. Cette année, il y aura aussi un spin-off du Digimonitor. Le spin-off a pour objectif d’étudier l’utilisation des médias par les décideurs publicitaires suisses et de la comparer à la population «normale». L’étude est en cours. Nous espérons que les décideurs publicitaires seront nombreux à y prendre part.


L’IGEM publie le Digimonitor en collaboration avec la REMP déjà depuis 2014. Quelles synergies cette coopération entraîne-t-elle?

La REMP est un partenaire fiable et compétent pour ce qui est de l’étude Digimonitor. Nous comptons sur son expertise en matière d’enquêtes sur l’utilisation des médias. L’intégration des résultats annuels de l’étude dans l’outil d’évaluation NEXT>LEVEL de la REMP nous permet de faire des comparaisons sur plusieurs années en un seul clic. Cela est très pratique. De son côté, en tant que co-éditrice du Digimonitor, la REMP peut mettre en avant ses compétences intermédias. Par exemple, les données collectées par la REMP et l’IGEM dans le cadre de l’étude Digimonitor sont les seules données fiables sur l’utilisation des réseaux sociaux en Suisse.


Merci pour ces observations intéressantes.


Siri Fischer © Melanie Ohnemüller

Qui est-elle?

Siri Fischer est la directrice de la communauté d’intérêts des médias électroniques (IGEM) depuis 2017. Elle est en outre la co-fondatrice de Datapeople, membre de la commission de la recherche de Mediapulse, membre du conseil de fondation de la Fondation Statistique Suisse en Publicité, membre du conseil de direction d’IAB Switzerland et membre du conseil d’administration de KS/CS Communication Suisse.